Les recettes record d’Oslo issues de l’énergie bousculent son image et ses choix. Tirée par l’envolée du prix du gaz, la Norvège a engrangé une manne évaluée à 109 milliards. Depuis 2022, selon des estimations. Pour éviter l’étiquette de « profiteur de guerre », le pays propose de garantir un grand prêt européen. L’objectif vise le soutien et la reconstruction de l’Ukraine, sans dévoiler encore l’architecture finale.
Les chiffres clés et l’effet du prix du gaz
Selon bfmtv.com, depuis l’invasion de l’Ukraine, la Norvège a pris la place de fournisseur pivot pour l’Europe de l’Ouest. La demande a basculé vers ses hydrocarbures, tandis que le prix du gaz a grimpé. Les recettes de l’État ont bondi et gonflé un fonds souverain déjà colossal, singularisant la situation financière d’Oslo.
Des économistes norvégiens estiment que cette envolée a généré environ 109 milliards d’euros supplémentaires depuis 2022. À leurs yeux, cette richesse inattendue implique une responsabilité particulière envers Kiev. Le pays, peu soumis aux tensions budgétaires qui pèsent sur ses voisins, dispose d’une marge de manœuvre rare pour appuyer un soutien durable.
À Bruxelles, la Commission prépare un prêt de 140 milliards d’euros au bénéfice de l’Ukraine. Le montage reposerait sur les avoirs russes gelés et fonctionnerait comme une avance conditionnelle. Kiev ne rembourserait qu’en cas de réparations versées par Moscou, afin de protéger son budget.
Causes, mécanismes et débats politiques en Norvège
Au Storting, plusieurs partis, y compris des soutiens du gouvernement travailliste, plaident pour assumer cette position privilégiée. Ils jugent que les profits associés au prix du gaz nourrissent l’accusation de « profiteur de guerre ». Les responsables souhaitent convertir cette rente en levier politique au service de Kiev et en instrument durable en Europe.
La cheffe des libéraux, Guri Melby, insiste sur l’enjeu de sécurité collective. Elle estime essentiel que la Russie ne gagne pas la guerre. Oslo doit utiliser sa capacité pour garantir une nouvelle dette ukrainienne. Son argument repose sur la cohérence stratégique et la crédibilité du soutien européen à long terme.
Deux économistes, Håvard Halland et Knut Anton Mork, soulignent que la Norvège conserve la note AAA et un fonds d’environ 1 800 milliards d’euros. Selon eux, une garantie n’entamerait pas sérieusement la solidité du pays. Le risque doit toutefois rester encadré par une architecture claire, au niveau européen et transparent.
Perspectives européennes et répartition des risques liés au prix du gaz
Le gouvernement avance prudemment. Oslo rappelle un programme d’aide civile et militaire de plus de 23 milliards d’euros prévu jusqu’en 2030. La secrétaire d’État Ellen Reitan indique suivre le dossier avec l’Union européenne. Elle ne promet pas que la Norvège garantira seule l’intégralité du prêt envisagé, à ce stade.
Des discussions techniques ont lieu avec la Commission sur le montage du mécanisme. Oslo veut éviter qu’un changement de régime de sanctions ou une contestation russe transfère tous les risques sur un seul État. L’objectif est de préciser un partage explicite des responsabilités et des déclencheurs en cas d’aléa juridique.
Au Parlement, les Verts souhaitent inscrire ce sujet dans les prochaines discussions budgétaires. Leur chef, Arild Hermstad, affirme que seule la Norvège peut mobiliser une telle somme et que les revenus du prix du gaz créent une obligation morale envers l’Ukraine. La décision pèsera aussi sur la place d’Oslo en Europe.
Ce que cette décision pourrait changer en Europe
Le choix d’Oslo fixera la portée du soutien et la manière de partager le risque. Une garantie renforcerait le signal de solidarité et fluidifierait le financement à court terme. À l’inverse, l’hésitation prolongée nourrirait les critiques. Entre responsabilité née du prix du gaz et prudence institutionnelle, la Norvège s’apprête à arbitrer un test politique majeur au sein du cadre européen en recomposition.